Moi, ma Némésis, ce n’est pas Miss Marple. Moi, ma Némésis, c’est la pluie.
Résumé pour ceux qui n’ont pas lu ça : mon petit Loulou 1er, Monsieur L., est autiste et scolarisé en « milieu ordinaire », c’est à dire à l’école du quartier. Il fait les apprentissages scolaires en temps voulu et dispose de l’aide à mi-temps d’une auxiliaire de vie scolaire. Il a rencontré, tout au long de sa scolarité, trois types d’instits : ceux qui l’ont réellement accepté et l’ont fait participé à la vie du groupe au maximum en initiant des projets qui convenaient à toute la classe dont lui, ceux qui l’ont relégué au fond de la salle pendant toute l’année scolaire et m’ont demandé avec insistance : « Il ne pourrait pas prendre un médicament ? Vous savez, je ne suis pas spécialiste ! » (Nan, Madame, je sais vous n’êtes spécialiste de rien, mais 1) je vous demande juste d’être enseignante, 2) l’autisme ne se guérit pas et 3) je ne vais pas le droguer et l’enfermer au fond d’une cellule de l’HP juste pour vous faire plaisir) et ceux qui l’acceptent-mais-bon -déjà-ils-sont-bien-gentils-alors- faudrait-pas-exagérer-non-plus-il-y-a-des-enfants-qui-sont-plus-en- difficulté-que-lui.
Cette année, il est dans ce dernier cas de figure. Je ne vais pas m’attarder ici sur les anecdotes de l’année scolaire. Concentrons nous sur la préparation de la kermesse. Que fait-on à la kermesse en général en CE2 ? Le plus souvent, les enfants chantent, dansent ou exécutent diverses chorégraphies en roller, vélo, etc. Toutes choses auxquelles Monsieur L. peut s’intégrer peu ou prou d’une manière ou d’une autre. Son instit, elle, a choisi de faire de l’accrogym. Pour résumer, il s’agit de faire des pyramides humaines.
Ici introduction d’une petite note utile : l’une des difficultés majeure des personnes autistes est le rapport à l’autre et notamment le contact physique appuyé ou prolongé.
Résultat : tout le dernier trimestre, Monsieur L. a été très malheureux de ne pas pouvoir participer aux répétitions, répétitions auxquelles il assistait pourtant. L’enseignante n’a pas envisagé une seconde de le faire participer en le chargeant d’une mission parallèle qu’il aurait pu assumer.
Deuxième note utile : étant donné que, alors même qu’elle reconnaît qu’il ne trouble aucunement la classe, l’institutrice refuse d’accueillir Monsieur L. lorsqu’il n’est pas accompagné de l’AVS (ceci d’ailleurs au mépris de la loi, mais passons), elle disposait de deux matinées par semaine pour ses entraînements.
Elle a bien essayé de me dire de le garder chez moi parce qu’il la gênait (évidemment, relégué sur un tapis pendant la séance, il n’a pas su rester pendant plus d’une heure à regarder les autres sans bouger. Il est vraiment mal élevé cet enfant, ça se confirme). C’est bizarre, je suis devenue brutalement sourde. Je suis très arrangeante en général (trop en fait) car je préfère temporiser pour que mon fils soit accueilli dans les meilleures conditions possibles. Je lui avais dit qu’il passait beaucoup de temps à lire, mais elle n’avait pas pensé à lui proposer un livre. Il devait attendre sans rien faire, comme une potiche, que les autres aient terminé. Il a souvent pleuré et m’a demandé des explications que je n’ai pas pu lui préciser plus avant faute de raison valable à avancer. Des troubles du comportement ont réapparu quelque temps, qui ont fait dire à l’enseignante : « vous voyez, il ne peut vraiment pas participer ».
N’allez pas croire que je suis une méchante gens, mais lorsque j’ai vu toute la classe peiner sous la pluie battante à faire son spectacle devant un public fort réduit, j’ai failli me dire : « Bien fait, non mais ». Cette pensée ébauchée ne s’est toutefois pas installée tant j’avais de peine pour mon petit Loulou qui aurait tellement aimé être avec eux. J’ai également éprouvé une certaine admiration pour les enfants qui ont exécuté tout ce difficile programme sans rechigner dans des circonstances fortement défavorables. Après tout, c’est vrai, eux non plus n’ont pas choisi leur instit. Ils n’ont pas démérité. Bravo à eux.